Jérémy Galvan au sommet des Monts du Lyonnais

“Plus qu’une visite, ce fut pour le Chef un voyage dans ses souvenirs d’enfance.”

À l’orée du projet, le succès du concept des dîners en forêt, proposition audacieuse ayant pour vocation de transporter les convives au cœur de la nature, dans un rapport presque charnel avec les arbres et toute cette vie foisonnante qu’en tant que citadin, nous avons tendance à ignorer voire oublier. Une parenthèse enchantée dans un cadre en rupture avec les codes de la restauration traditionnelle, pour une connexion profonde avec le milieu naturel, parmi les odeurs, les bruits familiers à notre enfance.

La magie des lieux, ce retour aux sources ravit les convives et c’est ainsi que la possibilité de pérenniser ce concept unique a amené le Chef à rechercher un lieu où vivre et faire vivre une symbiose avec l’environnement, de la récolte des ingrédients à la réception des convives. Dès lors, la recherche d’une bâtisse de caractère à l’orée des bois a débuté. Pascal, Consultant sur le secteur du Beaujolais, des Pierres Dorées et des Monts du Lyonnais, est spécialisé dans la quête de lieux de caractère à haut potentiel qui permettent de sublimer leur structure initiale. S’il a d’abord été charmé et impressionné de présenter un sujet à un Chef d’une telle renommée, Pascal a rapidement été séduit par l’authenticité de Jérémy Galvan, qui dès la première visite s’est livré au gré de la découverte de cette ancienne auberge et de ses alentours verdoyants.

Plus qu’une visite, ce fut pour le Chef un voyage dans ses souvenirs d’enfance, renouant avec la nature qui l’a vu grandir. Petit fils de paysans maraîchers, il a en effet baigné lors de son enfance dans une nature voluptueuse et riche en sensations. Des sensations ancrées qui n’ont eu de cesse de l’animer, rejaillissant au gré de la balade dans le sentier forestier attenant à la propriété. Lorsque Jérémy se plongea dans ses souvenirs d’enfance auprès de Pascal, ce dernier sut que les planètes étaient alignées. De cet échange presque intime s’est instaurée une confiance réciproque, d’autant plus importante que le secret se devait d’être bien gardé. Et si Pascal savait que Jérémy était un visionnaire, il était à ce stade loin d’imaginer l’ampleur du projet…

Si le choix de quitter la ville pour la campagne résultait d’un désir essentiel, il importait également de ne pas s’éloigner de sa fidèle clientèle du Vieux-Lyon. La situation de cette bâtisse, surplombant la ville, fut un argument décisif qui offrait la possibilité de “garder un œil” sur la ville lumière où son bistrot Contre-Champ continue d’animer le lieu où tout a commencé.

Bien que ce projet ait mûri dans son esprit depuis longtemps, seul Jérémy Galvan comprenait les ficelles à tirer pour donner vie à l’expérience qu’il souhaitait proposer. Un bâti en reflet de la forêt pour recréer une symbiose avec le sauvage, avec la nature indomptée, environnement propice à cultiver ses propres produits, ponctué par des éléments architecturaux rappelant les dangers qui menacent notre nature. Un an de travaux ont permis de modéliser ce qu’il imaginait. Aujourd’hui, un paysage endormi à l’image de l’hiver, qui commence à s’éveiller au rythme de la nature, demain le doux foisonnement du printemps... Seul élément pérenne, le tragique rappel de la violence que la nature subit, insufflé ça-et-là, sublimé par des éléments de décor prototypés en exclusivité pour le projet.

Tout est étudié pour sensibiliser, pour décupler les sens au travers d’éléments percutants, gustatifs ou architecturaux. Le bâtiment en bois brûlé évoque les feux de forêt, un sac poubelle végétal comestible pour contrer le gaspillage : chaque détail révèle une réflexion qui vise à susciter une prise de conscience, au respect de ce qui nous entoure et à considérer la nature dans sa merveilleuse perfection comme une entité à aimer et honorer. Car ne sommes-nous pas “partie de la nature” selon Spinoza, philosophe de la joie ?

“220 bpm est une invitation à la déconstruction de la gastronomie telle qu’on l’entend.”

Au-delà de cette scène de spectacle où chaque convive est immuablement le reflet de la nature environnante, une autre facette du concept concerne le sacrifice animal. Porté par la volonté de changer les paradigmes, le Chef a choisi de ne pas présenter les bouchées en amont de la dégustation, laissant la part belle à la subjectivité des émotions lors de la dégustation. Une explosion de saveurs qui confronte chaque convive à des sensations aussi singulières que sont leurs souvenirs, catalysant les réactions jusqu’aux larmes pour certains.

220 bpm est une invitation à la déconstruction de la gastronomie telle qu’on l’entend, un moment hors du temps où tous les sens sont attisés pour reconsidérer la haute gastronomie par un prisme définitivement ancré dans une réalité pourtant indicible. Une invitation à pénétrer dans l’ abîme d’une forêt soumise à pléthores d’épreuves, où chaque étape est pensée pour la vivre et la ressentir en perdant toute notion du temps et de l’espace.

Chaque dîner n’accueille que 14 convives, dont le seul point commun est le point de rendez-vous pour débuter cette expérience à Bellecour. Les yeux bandés dans un van où l’expérience sonore et olfactive débute dès le premier kilomètre est une savante orchestration visant à ressentir l’environnement à l’unisson, vivre une expérience aux antipodes de tout ce qu’un étoilé peut proposer, fracturant les codes usuels pour transporter les convives dans un moment hors du temps.

Sortir des sentiers battus dans un lieu symbolisant pourtant son retour aux sources, telle est la proposition du Chef Jérémy Galvan à travers cette ode à la symbiose unique en son genre.

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